La vidéo féministe en France et au Québec.
La réalisatrice Carole Roussopoulos répond à un entretien mené par Hélène Fleckinger pour la revue Nouvelles questions féministes en 2009 :
“C’est vrai que dans tous les groupes vidéo des années 1970, les femmes ont occupé une place très importante. Mais ce n’est pas du tout parce que les caméras n’étaient pas lourdes que les femmes se sont emparées de la vidéo, contrairement à ce qu’on entend parfois. Nurith Aviv, qui est une des premières féministes camérawoman et qui a fait des films magnifiques, est petite, mais elle portait des caméras énormes 16 ou 35 mm ! Je ne pense pas que ce soit lié au poids de la caméra, mais au fait qu’il s’agissait d’un média vierge. Il n’y avait pas d’école, pas de passé et pas d’histoire. Les hommes ne s’en étaient pas encore emparés. Quand les femmes ont découvert cette machine, comme moi, elles se sont dit qu’il suffisait d’essayer : on efface, on recommence, on apprend sur le tas. Les caméras ne coûtaient pas très cher. Même si ça exigeait un investissement important au départ, les bandes étaient ensuite relativement bon marché, comme aujourd’hui les cassettes mini-DV. Nous pouvions donc prendre le temps de nos erreurs… Recommencer n’était pas dramatique.
Dans les groupes vidéo, y compris mixtes, je n’ai pas ressenti de sexisme, et c’était extrêmement satisfaisant. Les femmes y occupaient une place très égalitaire avec les hommes. Contrairement au cinéma, les femmes n’étaient pas seulement monteuses, elles étaient aussi réalisatrices. Nous étions en fait des artisanes, plus que des réalisatrices et des monteuses. Nous faisions tout et chacune savait tout faire. Les femmes se sont emparées de tous les postes de travail. Il n’y avait pas de division entre travail intellectuel et manuel/technique, et donc pas de hiérarchie, y compris entre les sexes.”
Notre Escale de la semaine, Bandes de féministes, concoctée par Julia Minne, doctorante et programmatrice, vous propose sept films pour explorer la production vidéo féministe en France et au Québec de 1971 à 1997.
Des films qui témoignent des aspirations de groupes d’artistes professionnelles ou amatrices qui manifestent un désir profond de rendre visible la culture des femmes. On y dénonce et on s’organise contre les violences patriarcales exercées sur les corps des femmes. On y met en lumière le travail invisible au sein du foyer. On y milite, on parle, on crée, on se mobilise !
Sept films pour découvrir un héritage et se questionner sur les ruptures et continuités entre les différentes générations de féministes, d’hier à aujourd’hui – ce qui dure, ce qui perdure, et les luttes, toujours à mener.
Retrouvez ici le texte de Julia Minne !
Bons films !