Les lignes de désir
Il y a des trottoirs, des passages pour piétons, des pâtés de maisons à contourner, la ville bien ordonnée, des bancs de-ci de-là pour s’y reposer, il y a des panneaux indicateurs, de larges sentiers goudronnés, des parcs aux allées parfaitement pavées. Et puis parfois, là au milieu, entre deux chemins prévus pour cheminer, visible dans la neige, visible dans la pelouse, il y a une “ligne de désir“, dessinée par les pas répétés des personnes qui l’ont empruntée – “courbure optimale du tracé qu’un piéton laisse dans son sillage lorsqu’il est totalement libre de son mouvement.“¹
Ainsi les petits piétons laissent leur petite trace, chacun son tour, rendant visible la liberté qu’ils prennent au milieu des grands ordonnancements de l’espace urbain, et on dit que c’est leur désir.
Mais trêve d’urbanisme. Il est question d’amour, cette semaine, et des chemins qu’on peut prendre, petits piétons, à travers champ, à travers des pelouses qu’on peine à envisager autrement qu’interdites.
Amours, des chemins buissonniers, c’est le titre de notre Escale, en partenariat avec Binge Audio et le podcast Le Cœur sur la table. Les programmatrices Caroline Châtelet, Lysa Heurtier Manzanares et Éva Tourrent ont choisi sept films qui, de l’Italie de 1964 au Paris de 2016, de l’Ariège à Okinawa, se demandent ce que c’est, l’amour avec un grand “A”. Et s’il ne pourrait pas y avoir encore tout un alphabet, au-delà des modèles dominants ! Sept films qui invitent à “penser en dissidence” à sortir de ce qui nous est donné comme évident et inébranlable, à inventer, imaginer, explorer, et puis vivre tout ça, toutes ces amours, plurielles, uniques, qu’il faut bien vivre !
Et puis, pardon, mais un dernier détour par l’urbanisme vaut peut-être encore le coup, si la métaphore vous a échappé : Wikipédia nous précise que “les lignes de désir coupent parfois au travers de secteurs sauvages et sensibles.” C’est dit.
Bons films !
¹ Sonia Lavadinho, chercheuse et géographe.