L’Afrique documentaire
Dans les salles de Cinéma du réel ces jours-ci étaient projetés des films d’une programmation spéciale intitulée L’Afrique documentaire. Nous vous en proposons cette semaine une petite reprise, avec un petit écart.
La petite reprise, ce sont 3 films issus de la sélection Le documentaire africain vu d’ici qui réunissait 12 films d’une nouvelle génération de cinéastes issus du continent tout entier.
Le Disqualifié est un film tunisien tourné sur la durée : 12 années de la vie d’un comédien qui se heurte à lui-même et aux difficultés de son pays. Rempli d’une énergie rageuse, “il se bat contre l’inertie et le fatalisme présents chez la jeunesse tunisienne”, et certainement contre son propre désespoir. Mehrez – c’est son nom – “danse, crie, aime, boit” : le film le suit, caméra au poing, le film le soutient et l’accompagne, et nous suivons ses pas.
Que faire de l’énergie rageuse ? Après ta révolte, ton vote raconte les suites de l’insurrection de 2014 au Burkina Faso. Et comment un groupe de militants tente de transformer l’ardeur d’une révolte en réel désir de démocratie. “Le Balai citoyen”, ils s’appellent. Un mouvement résolument politique, qui croit au pouvoir du vote, qui garde espoir en la mobilisation, en une possible représentativité, en la démocratie, quoi.
Enfin, Garderie nocturne se déroule également au Burkina Faso, dans un quartier populaire de Bobo-Dioulasso. C’est l’histoire de Maman Coda, mais pas seulement. C’est l’histoire de cette vieille femme, des enfants qu’elle garde la nuit, et de leurs mères, prostituées. Notre programmatrice, Lysa Heurtier Manzanares, écrit : “Moumouni Sanou prend place dans cette communauté et crée des interstices : des moments où elles se racontent, échangeant sur ce qu’elles vivent avec leurs clients, laissant transparaître malgré leurs rires les risques auxquels elles font face chaque nuit ; et d’autres où, avant que le jour ne se lève, elles dorment ensemble, leurs bébés collés contre elles. Instants de repos et d’osmose volés au quotidien…”
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Pour ce qui concerne le petit écart : c’est un Fragment d’une œuvre que nous consacrons à Jean-Marie Teno. En salle pendant le festival, parmi les Figures tutélaires du cinéma africain était montré Afrique, je te plumerai, que nous reprenons en ligne cette semaine. Une étude toute personnelle menée par le cinéaste camerounais, autour des multiples conséquences du colonialisme. Notre programmateur Olivier Barlet qualifie ce film de “méditation à voix haute qui deviendra caractéristique de ses films : une voix-off à la première personne, souvent ironique, qui n’est pas illustration des images mais induit avec elles une distance critique. Plus qu’un témoin, il devient interlocuteur. Loin d’être neutre et objectif, il s’engage. (…) Ce document essentiel est ainsi une vivifiante réflexion sur l’Histoire contemporaine.”
En plus de ce film essentiel, nous avons choisi de vous faire découvrir trois autres documentaires du cinéaste, qui tous observent l’histoire et le contexte politique et social d’une partie du continent africain. Une exploration frontale du rôle à tout le moins problématique des missionnaires chrétiens dans le colonialisme, dans Le Malentendu colonial. Un point de vue sur la place de la culture et du cinéma au Burkina Faso – et plus largement dans l’Afrique contemporaine : c’est dans Lieux saints. Enfin, une réflexion profonde sur le pouvoir, son exercice et ses abus à tous les niveaux des institutions, que ce soit au sein des plus petits villages ou bien tout “en haut” de l’État : Chef !
Bons films !