C’est vrai ça, les usines, on ne les voit plus. C’est ce que dit cet homme qui habite à Fos-sur-Mer, entouré de raffineries. Il parle de tout ce qu’il aime là : les plages, l’eau, le soleil. Il ne les voit plus, les usines autour. Là où nous sommes c’est le titre du film. Là où nous sommes, c’est ce constat : le fait d’habiter quelque part, et d’y être attaché malgré tout, malgré la crainte et le danger objectif. La réalisatrice nous emmène sur les bords de l’étang de Berre et nous montre sa beauté terrible tout en nous faisant entendre les voix des habitants. Comment vivent-ils ce paysage ? Comment le voient-ils ? Voient-ils les usines ? Oui, tiens, regardez autour de vous : vous les voyez, vous, les usines ?
Monique et Michel ne s’accommodent pas de la saleté de nos sociétés. Présentons-les : Michel Pinçon, Monique Pinçon-Charlot, deux sociologues célèbres et célébrés pour avoir fait de la très grande bourgeoisie leur sujet d’étude toute leur carrière durant. Des châteaux aux chasses à courre, des dîners mondains aux grandes familles. Dans À demain mon amour, Basile Carré-Agostini les filme au quotidien dans une période particulière de leur vie de sociologues : la retraite. Elle leur permet une chose précieuse : la fin du devoir de réserve. Alors ils se battent, descendent dans la rue, prennent des notes, écoutent, parlent, et inlassablement s’indignent contre l’indécence des extrêmes-riches.
Et aussi : ils s’aiment. Pendant 50 ans, ils ont vécu et travaillé ensemble. C’est aussi ce que capte ce film avec simplicité, au petit-déjeuner tout décoiffé ou dans quelque nuage de lacrymo. Du travail et de l’amour.
Aujourd’hui 19 janvier s’ouvre à Biarritz, élégante ville balnéaire de la côte basque, le festival Fipadoc. À cette occasion, tous les ans, Tënk remet un prix dans la section consacrée à la jeune création documentaire internationale – des films réalisés par des étudiants dans le cadre de leur formation. L’occasion pour nous d’y consacrer une programmation Premières Bobines : trois films passés par cette sélection récemment. À commencer par le lauréat du prix Tënk en 2023 : The Silence of The Banana Trees, de Eneos Çarka. Une incursion dans la maison d’un homme, Mihaly, peuplée d’arbres et de plantes et d’œuvres d’art. Toute une intimité touchante et belle, qui nous donne, par indices, des nouvelles de ce monsieur, de sa solitude, de sa fille qu’il aime et qui est trop loin…
I Don’t Feel at Home Anywhere Anymore. On ne peut être plus explicite : « Je ne me sens plus chez moi nulle part », nous dit le titre du film de Viv Li. C’est ce qu’elle se dit lorsqu’elle retourne à Pékin, alors qu’elle vit à l’étranger depuix dix ans. En famille, entre amis, elle nous montre sur un ton tragicomique la distance qui la sépare de cette vie chinoise – déracinée, Viv Li observe ce qui fut un jour sa vie quotidienne et ne la comprend plus bien…
Et enfin, Pupus ! Ou comment un jeune garçon s’invente des mondes tout entiers avec des marionnettes et des mots. Ça se déroule dans un petit théâtre familial en Sicile, dans lequel il y a des princesses, des décors peints, des costumes, des chevaliers, tout ce qu’il faut pour jouer très sérieusement, à longueur de temps. Et pour acquérir un savoir-faire : celui de nous faire plonger, un jour, plus tard, dans des mondes imaginaires…
Bons films !