Un conte de Noël
Mésanges, hulottes, dindons, mulots, marabouts, bongos, grues royales, lionnes, hippopotames, coqs, humains, renards, antilopes et bœufs musqués.
Il était une fois tous ceux-là, et bien d’autres encore. Lorsque commence l’histoire, ils ont été serrés comme des sardines pendant 40 jours (ou 7, selon qui raconte) dans les cales d’une arche bricolée à la hâte. Et quand les portes de celle-ci se rouvrent, on les voit débarquer.
Il a fait un temps vraiment, vraiment pourri, au dehors. Pendant quelques minutes, au sortir du vaisseau, tout le monde reste bouche bée devant le spectacle de la dévastation. Sur les pentes de la montagne, les glaciers sont des fleuves de neige fondue. Les abeilles somnolent et les Center Parcs pullulent. Il y a de grands champs de barbelés dans la Méditerranée. Les hommes tuent les femmes avec leurs mains d’hommes. L’hôpital public se fissure, les infirmières font des heures sup à en tomber. Le bureau de poste affiche encore fermé aujourd’hui. Les pauvres sont requalifiés en “personnes en situation de sobriété subie”. Bref, quelque chose a cloché.
Donc, on les voit débarquer, descendant de l’arche, qui à quatre pattes, qui sur deux pattes, qui même en rampant. Il y a là Jésus, Karl Marx, Louise Michel et un très gros bœuf musqué, qui se regardent, soucieux. Et après un court conciliabule, ils constatent en effet d’une seule voix : “quelque chose à cloché”, chacun y allant de son propre “mais où sont passés nos idéaux ?”
(Ils sont passés là-bas, sur la colline d’en face. Celle avec la grande barrière autour. Celle avec la clim à fond. Celle qui peut épargner pour ses vieux jours. Ils ont été recyclés, remâchés, façonnés et polis, et puis vendus sur les marchés.)
“Que faire ? demande alors Jésus. Ne nous reste-t-il qu’à nous aimer les uns les autres ?” Mais le temps que Karl et Louise hésitent, le bœuf musqué était déjà en route. Il avait une autre idée en tête.
Il s’éloigne, le bœuf musqué, vers la colline d’en face. On le voit se balancer avec ses grosses épaules poilues. Taper du sabot dans la terre. Ce n’est pas parce qu’on est silencieux qu’on n’a pas les naseaux qui fument. Fini de ruminer. Et puis les girafes aussi. Et puis les lionnes et les canetons. Petit à petit ça fait une foule – mulots, dindons, humains, ânes et chardonnerets. Ce n’est pas que de la colère. C’est le besoin de se dégourdir les pattes, de prendre sa place, d’être soi. Petit à petit ça recouvre la colline d’en face, ça la recouvre d’une masse pleine de vie, c’est violent, c’est doux et c’est vivant. La colline est reprise. La plaine est reprise. Personne ne sait trop où tout cela pourra bien aller. Il n’y a pas de morale. Voilà, plein d’animaux ont tout submergé.
Oui il y a des animaux, beaucoup d’animaux dans cette semaine spéciale sur Tënk ! Parce que le documentaire est aussi un grand genre animalier, nous avons choisi pour vous – et pour vos enfants ! – 6 films avec des plumes et des poils.
Des plus proches de nous dans la basse-cour (Tapage dans la basse-cour) aux plus lointains dans le Grand Nord (l’immense Cornouailles de Pierre Perrault), il y a de quoi se rendre compte que nous ne savons rien des mœurs animales. Et donc de quoi découvrir ! Les rivalités entre poules et pigeons, le caractère parfois pénible des coqs (dans la comédie Tungrus), celui des renards et de leurs maîtres (Le Camionneur et le renard), les stratégies de chasse des lionnes (dans le sublime (et, il faut le dire, un peu sanglant !) La Griffe et la Dent)… ou encore la vie sous-marine des nouvelles espèces plastiques (Dar(k)win Project) !
Bonne découverte, et bons films !