On peut dire qu’il y a encore beaucoup de paysages cette semaine sur Tënk. Il y en a des mouillés, il y en a des secs. Mais plutôt des secs.
Commençons par le mouillé. La Finlande, l’archipel de Kvarken (63° nord). Un endroit unique, « où la mer est l’avenir de la terre et où la terre était auparavant la mer ». Un endroit où les choses se mêlent et où le regard ne sait parfois plus demêler le vrai du faux, le fantastique du terre à terre. C’est dans Land That Rises and Descends, de Moona Pennanen. « Animaux ou humains, écrit Julia Pinget, elle suit ses personnages qui, tels des présences fantomatiques, vont et vivent et s’ébattent sur l’archipel en d’étranges activités ». Mystère, traditions et etrangetés. Et masques de créatures flippantes.
Quant au sec : pas besoin d’aller très loin, avec Bobby brûle. C’est dans le Sud de la France, quelque part où les choses peuvent facilement brûler, vers la Provence. Un court métrage de notre série de l’été, qui suit Bobby et Melo, jeune homme et jeune femme, qui semblent vivre de pas grand chose, d’été et d’histoires qu’ils se racontent. Ça transpire, ça rêve d’une maison, ça danse plus ou moins, ça vit quelque chose à deux, un peu à côté du monde, un peu en solitaire à deux. Et on les aime bien, Bobby et Melo, filmés qu’ils sont avec fantaisie, sensualité et un brin de fiction, par les deux réalisatrices Amélie Bigard et Jade Boudet.
Galb’Echaouf, de Abdessamad El Montassir, prend place dans les paysages sublimes et secs du Sahara. Et il ne s’y dit pas grand-chose. Ou plutôt : il se dit, dans ce film tout en poésie, que pour parler du passé, les mots ne viennent pas. C’est toute la recherche du réalisateur que de savoir si un immense trou de mémoire historique pourrait éventuellement se combler. Les habitants sont-il capables de raconter la « longue nuit » traversée par ce territoire ? La voix dit : « Une coutume courante ici nous dit de placer une petite pierre sous notre langue si nous souhaitons oublier quelque chose, et de la jeter vers le soleil si nous souhaitons nous rappeler et raconter ». Et : « Depuis que cette longue nuit plane, tout le monde garde sa petite pierre sous la langue ».
Voici un grand film de 1959, de Margot Benacerraf, réalisatrice majeure du cinéma vénézuélien : Araya. Une péninsule (10° nord), l’un des endroits les plus secs de la planète, exploité depuis plus de cinq cents ans pour ses abondantes mines de sel. La réalisatrice y capture la vie des salineros, en une fresque contant le vie de 3 familles dont les gestes se répètent sans cesse, peut-être depuis des générations. Un récit quasi-biblique, profondément humain, qui obtint en 1959 le Prix de la Critique à Cannes. À ne pas rater !
Pour finir, un court métrage ludique par certains aspects, et pas drôle du tout par bien d’autres. Urban Solutions est un film réalisé à quatre mains, qui met en rapport les peintures et le témoignage d’un artiste allemand au Brésil dans la période coloniale (sa forêt vierge, sa chaleur étouffante, ses moustiques, ses senhoras entourées d’esclaves) et le quotidien de travailleurs dans le Brésil contemporain (leurs salaires de misère, leurs doubles jobs, leurs humiliations quotidiennes). Ce sont principalement des gardiens de résidences huppées. Des pauvres qui protègent les portes des riches. Des pauvres au service des riches. Quand les rapports de domination de classes sont aussi clairs, quand ils ressemblent presque aux peintures du peintre allemand, peut-être que la colère pourrait prendre le dessus ?
Bons films !