•• Cette semaine sur Tënk – Les États généraux du film documentaire
26 août 2022
Les États généraux du film documentaire
Quand “hop !” suscite l’idée d’un bond, d’un saut, “zou !” impliquerait plutôt la notion de mouvement, de départ, mais aussi une forme de décision soudaine, de détermination à agir. Il se trouve que selon nos sources,”zou” serait en pachtou une forme conjuguée du verbe “aller”. C’est aussi un jeu, en Afghanistan, qui met à l’épreuve l’endurance et la capacité pulmonaire.
Dans notre nouvelle sélection consacrée au festival de Lussas, il y a, donc, Zou, réalisé par Claire Glorieux. Nous ne saurions trop vous le recommander, c’est une formidable histoire, qui tient de l’épopée et de la grande histoire d’amitié et de solidarité. En fait, c’est un film bon. C’est-à-dire qu’il parle de la bonté, et qu’il le fait avec une immense générosité. C’est un bon film bon, quoi. Il raconte l’histoire d’un homme arrivé en France depuis l’Afghanistan, amputé d’une jambe, qui rencontre un autre homme qui l’accueille. Et ceci est raconté non seulement par leurs voix, mais aussi par un magnifique travail de photos découpées, animées parfois, de collages, de maquettes de carton et puis quelques chansons. On nous raconte une histoire avec du soin et de l’attention, c’est inestimable ! et cela donne un film ouvert à tous, rempli d’intelligence et d’émotion.
Zou, sur les écrans lussassois, fait partie de la sélection Expériences du regard, consacrée à la production francophone européenne de l’année. Nous vous en proposons trois autres films cette semaine.
Il y a Frères, de Ugo Simon. Trois hommes, trois histoires et un drame commun : la mort de leurs frères respectifs, tués par la police. Un drame, mais surtout : une injustice – des procès qui n’aboutissent à rien, la police qui se protège, le système judiciaire complice… Les trois hommes sont unis dans le même combat, mais ils racontent ici chacun leur histoire, séparément : ils racontent surtout leur réaction face à l’insupportable injustice, et la force qu’ils vont puiser pour se battre. Ce sont trois discours d’une puissance et d’une analyse rares – analyse des événements, mais aussi et surtout de leurs propres personnes, de leurs transformations profondes, intimes même. C’est un film de mots choisis, cherchés, trouvés. Ce sont trois hommes – parmi bien d’autres – qui ont besoin de la parole, tant qu’ils ne trouvent pas la paix, tant qu’il n’y a pas de justice.
Pour trouver la paix, une autre forme de paix, Elisa Gómez Alvarez, dans Soraya Luna, se plonge dans des archives VHS familiales. Des images apparemment banales et quotidiennes, sous lesquelles le film nous fait lire d’autres choses, plus sombres. Elle nous parle ainsi des histoires dont on ne parle pas, et qui pour cela imprègnent nos vies. Le film est un mouvement de libération, de reprise de pouvoir par rapport au passé. C’est un travail de montage remarquable, tout en suggestions, auquel nous avions remis le Prix Tënk – Opening Scenes au festival Visions du réel à Nyon en 2021, et que nous sommes très heureux de vous présenter enfin !
Enfin, pour clore cette sélection Expériences du regard : “te souviens-tu du premier jour où nous nous sommes vus ?”. Ce n’est pas une question anodine, que pose António, dans Nos printemps passés ne reviendront plus. C’est même une question fondamentale pour qui vieillit et constate l’effacement de la mémoire de sa conjointe. Plus que la nostalgie, ce court métrage met en scène ces choses qui nous dépassent : nos choix, les trajets de nos vies, les rencontres, les histoires communes… et ce qui nous attache aux autres.
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Connaissez-vous Mauro Santini ? Nous consacrons cette semaine un Fragment d’une œuvre à ce réalisateur italien mis à l’honneur cette année aux États généraux.
Son travail est singulier : il façonne année après année des séries de films. Nous vous présentons par exemple deux épisodes (parmi cinq) des Passeggiate (Promenades) : Parmi les hirondelles et La Maison au bord de la mer. Cette série de courts métrages a pour thème principal l’acte de marcher, sans destination précise, pour le pur plaisir d’observer, d’attendre et d’écouter, en se laissant porter par de petits événements, par le tout venant de la vie… De même, les sept Videodiari : courts récits sans scénario, sans budget, sans équipe, qui partent sur les traces de la mélancolie. Traces que suit également Attente d’un été, premier épisode de la série Le Vacanze… De quoi errer, se laisser emporter à la suite de son chat, plonger dans quelques souvenirs, être attentif aux paysages, de quoi se promener dans les films, quoi, court métrage par court métrage. Promenons-nous, oui.
(notez que les films de Mauro Santini ne seront disponibles qu’à partir de dimanche 28 au matin)
Allez, zou !