« Les ordinateurs, plus on s’en sert moins, moins ça a de chance de mal marcher » dit-on chez les Shadoks, dont la philosophie doit nous inspirer jour après jour. C’est notamment au service des Shadoks et de leurs machines à pomper qu’une autre machine fut utilisée : l’animographe. Son histoire nous est racontée dans L’Animographe, ou Je suis né dans une boite à chaussures, de Thierry Dejean. Une histoire technologique et celle d’un inventeur, Jean Dejoux, qui en 1961 travaillait au sein du service de la recherche de la RTF. Une machine, ça sert à simplifier la vie – ici, à faire moins de dessins pour aussi bien animer des films. Il n’y eut qu’un seul prototype, et puis, un jour, plus tard, les ordinateurs ont pris le pouvoir.
« À une époque où la magie est accessible par simple pression d’un bouton, la nouvelle musique devrait par principe représenter quelque chose qui s’apparente à un danger » dit Helmut Lachenmann, qui n’est pas un Shadok. Mais un compositeur allemand. Sa composition Grido (2001) est ici, dans Regards sur Grido, répétée et interprétée par le Quatuor Diotima, qui n’est pas une machine. Mais un groupe d’humains qui tentent de faire, avec leurs instruments en bois, les sons voulus par l’auteur : « des phénomènes d’oscillation, des impulsions, des couleurs statiques, des fluctuations, des textures et des structures ». Un film comme une porte d’entrée, bien décrite par notre programmateur Daniel Deshays : « Le travail précis de l’orchestre nous permet de progresser, d’entrer pas à pas par des explications qui sont autant de clés de lecture d’une écriture complexe. (…) Le film nous renvoie à l’apprentissage d’une écoute plus attentive du monde, celle qui permet à chacun de côtoyer sa propre poétique. »
Le film de plage est-il un genre ? Nous ouvrons le débat.
Avec, d’abord, Happy Winter, de Giovanni Totaro. C’est la plage de Mondello, près de Palerme. À Mondello, la météo prévoit ce samedi 29 juillet 2023 une température de 36°, baissant à 28° entre 4 et 5 heures du matin. C’est l’été, c’est les vacances, il a fait 47° à Palerme lundi dernier, les montagnes alentour sont en feu sur des hectares et des hectares. Mais lézarder sous les parasols en regardant ailleurs, c’est important. Et c’est un peu ce que font les estivants de Happy Winter. Parce que le temps libre et les congés, c’est sacré. Qu’un feu brûle ou que la crise économique fasse rage, on tient à ce repère, quelque peu nostalgique, celui de l’insouciance.
Avec, ensuite, Pick Up, de Lucia Sanchez. Ici c’est Benidorm, Costa Blanca, Espagne (samedi, il y fera seulement 32°). C’est un drôle de court métrage, sans dialogues, qui observe les vacanciers, pour beaucoup à l’âge de la retraite, tout à leur oisiveté organisée. Torses nus, raquettes de plage, gymnastique douce, danses de salon. Ça pourrait être tendrement doux et un peu mordant. Mais petit à petit quelque chose cloche. Tout ça devient inquiétant. Tous ces divertissements organisés au milieu des barres d’immeubles couvrant le littoral. Tout se tord un peu. Toute cette détente qu’on s’impose. Ça fait presque un peu peur. En vacances, j’oublie tout ? Tu parles.
Enfin, voici notre coup de cœur de la semaine : Ouaga Girls, de Theresa Traore Dahlberg. Où il est à nouveau question de machines : des automobiles. Ouaga Girls suit plusieurs jeunes femmes à Ouagadougou : Bintou, Chantale, Dina et les autres suivent ensemble une formation de mécaniciennes dans une école réservée aux femmes. C’est leur dernière année d’études, moment crucial, dans un pays en plein bouillonnement politique et social. Le film raconte leur quotidien avec poésie et attention : ensemble, solidaires, elles évoluent vers leur avenir professionnel. C’est le moment, aussi, où leurs désirs de carrière vont d’autant plus se confronter aux attentes que la société place en elles. La mécanique, une affaire d’hommes ? C’est ce cliché qu’elles comptent bien dégommer ! Et elles le feront avec énergie et étincelles !
Bons films !