Au cours de l’année écoulée, qui n’a pas eu envie de partir loin, très loin, de s’échapper vers de grands espaces ?
Avec Picture of Light, Peter Mettler nous embarque vers le grand Nord, 5000 kilomètres en direction du cercle polaire, mû par la quête d’enregistrer sur pellicule les aurores boréales. Mais peut-on capturer la lumière ? Au fil des jours et des tempêtes de neige, le cinéaste canadien bloqué avec son équipe dans la dernière ville aux portes de l’Arctique, recueille la parole de ses habitants et nous livre ses réflexions sur les limites de notre époque et de la technologie. On vous recommande chaudement cette expérience poétique qui oscille entre science et métaphysique, entre trivial et sublime.
Cette question des limites de la représentation, du visible et de l’invisible, traverse également Industrie et Photographie programmé cette semaine sur la Plage Histoire et Politique. Le réalisateur allemand et théoricien du cinéma Arun Farocki se demande ce qu’il est encore possible de voir, au fil de l’avènement de la production industrielle moderne toujours plus cachée derrière les enceintes des entreprises.
Tendresse et froideur des relations tarifées. C’est ce qu’il transparait de l’écoute du témoignage de sept travailleurs du sexe roumains, ou plutôt des visages de ces jeunes hommes réécoutant leur voix et qui nous révèlent beaucoup de ce qui ne se dit pas avec des mots. Blue Boy de Manuel Abramovich, récompensé de l’Ours d’argent du meilleur court métrage à Berlin en 2019, est une rencontre ambigüe et troublante.
Dans Le Verrou, coréalisé par Leila Chaïbi et Hélène Poté, trois femmes tunisiennes témoignent elles du tasfih, un rituel magique devant empêcher toute pénétration avant le mariage. Pour Olivier Barlet, programmateur pour la plage Docmonde, ces femmes “ont le courage de parler de ce qui ne se dit pas, abordant, de fait, la condition de la femme, dévoilant peu à peu leur visage à la caméra.”
Enfin, nous vous proposons avec notre coup de cœur de la semaine, la découverte d’un monde aussi étrange et extrême que les pôles : celui de l’adolescence ! Dans Swagger, le scénariste et réalisateur de fictions, Olivier Babinet nous transporte dans l’univers de onze collégiens d’une banlieue au Nord de Paris. S’ils habitent l’un des territoires les plus défavorisés de France, leur parole est à la fois lucide et drôle. Attention, vous risquez bien d’être emportés par la mise en scène complice de leurs rêves et fantasmes car tous ont résolument le “swag”, cette classe, cette élégance mais aussi cette crânerie propre à leur âge.
Bien calés dans votre fauteuil, il ne vous reste plus qu’à vous laisser emporter par cettepremière programmation de l’année, vers tout ce que nous ne pourrons jamais totalement voir et aussi vers toutes celles et ceux que nous pouvons ainsi approcher grâce au cinéma.
Nous vous souhaitons une belle année 2021, pleine de lumière, de films et de rencontres !