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•• Cette semaine sur Tënk

13 novembre 2020

Il y a deux ans, nous étions presque le 17 novembre 2018, le jour de ce qui ne s’appelait pas encore le 1er acte du mouvement des gilets jaunes. Nous en sommes loin, en 2020. Loin de ce truc incompréhensible, que l’éditorialiste effrayé catégorisa, que le pouvoir violent condamna (“s’attaquer aux bâtiments de la république, c’est s’attaquer à la démocratie” osa un ministre (qui estimait certainement, en revanche, qu’y manger du homard était un acte patriotique)), que la bourgeoisie craignit. On se rassembla, on parla, on défonça la porte d’un porte-parole du gouvernement (aujourd’hui éloigné des écrans), on hurla, on s’organisa, on parla, on boxa, on défila, on se fit défoncer le visage au LBD, on défila encore, on tint les ronds-points, aussi longtemps qu’on put.

Nous reprogrammons cette semaine Imagine, demain on gagne, de François Langlais et Arthur Thouvenin. 5 mois de la vie des Gilets Jaunes de Saint-Nazaire, entre occupation de leur Maison du Peuple, actions, assemblées, colère et perspectives d’avenir. C’est un anniversaire, mais c’est aussi le rappel d’un moment crucial, où il est devenu flagrant que le pouvoir vrillait. Qu’il était capable d’assumer de blesser et de tuer. Qu’il était de manière manifeste dans le camp opposé au peuple. Que “la-démocratie” ne lui était qu’un mot de façade pour défendre ses intérêts. Qu’il était criminel, quoi. S’il y avait de quoi lutter en 2018, il y aura de quoi faire en 2021 : un pouvoir endurci, les deux pieds dans l’autoritaire et, en face, la nécessité de retrouver l’énergie pour le défaire.

Reste à définir “on” et “gagne”, dans “on gagne”.

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Deux programmations “groupées” cette semaine. D’abord, un écho au Festival dei Popoli de Florence, dont Tënk est partenaire. Quatre films issus de la compétition internationale 2019. Parmi eux, quelque chose de dérangeant : This Film is About Me. C’est une rencontre avec une femme, Renata, qui se met en scène, qui joue avec la caméra, et avec le réalisateur complice qui lui laisse cet espace. Celui d’être celle qu’elle voudra, pour le film : une femme séductrice, charismatique, un personnage fascinant. Fascinant et condamné pour meurtre…

Une autre forme d’enfermement, peut-être, dans Je n’ai rien vu, j’ai tout vu, de Yaser Kassab. Ou plutôt, une distance indépassable. Entre l’exil du réalisateur et ses parents, sa vie passée, ses morts, restés en Syrie. Un court métrage suspendu, comme le réalisateur, à côté du temps et de l’espace, ni ici ni là.

Enfin, découvrez le prix Tënk décerné l’an dernier pendant le festival-en-présentiel dei Popoli : une rencontre avec le jeune Theodor, où il est question – entre autres – de chasse aux bisons et de pingouins dans le yaourt.

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Le quatrième film de la plage Festivals, Non è sogno, fait aussi partie du Fragment d’une œuvre consacré à Giovanni Cioni ! Avec Per Ulisse et Dal Ritorno, découvrez 3 films de cet auteur qui trouble les genres, brouille les pistes entre fiction et réalité et – selon les mots de notre programmatrice Claudia Maci – “déconstruit les codes documentaires au service de l’authenticité poignante, confuse et résistante de ses personnages“.

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Enfin, ne ratez pas le très beau film de Manon Ott, De cendres et de braises. Tout en poésie, tout en noir et blanc, c’est une plongée sensible dans l’univers des cités des Mureaux, au passé industriel aujourd’hui dépassé, celui des usines Renault-Flins. Et ce sont de très belles rencontres, où chacun, jeune ou vieux, fait part de son talent pour mener sa propre vie, dans l’oppression et dans la révolte.

“Tu casses les braises et ça fait des flammes” dit l’un d’entre eux. Allez.

Bons films !