Sur le blog tout au long de l’été, nous allons vous raconter l’histoire de Tënk sous la forme d’épisodes hebdomadaires. Parce qu’il est essentiel pour nous de partager avec vous ce qui fait la force de ce projet, nous souhaitons vous donner à comprendre notre ancrage géographique, notre place dans le paysage professionnel de l’audiovisuel aujourd’hui, notre économie… Vous faire part également des envies qui nous animent, des problématiques qui nous traversent et des perspectives d’avenir que nous inventons. Souvent, les gens imaginent que les bureaux de Tënk sont à Paris, mais non, nous sommes en Ardèche ! Aujourd’hui nous vous invitons à vous pencher sur 40 ans d’histoire du cinéma documentaire dans notre village du Sud de la France.
Le week-end dernier, nous avons célébré le deuxième anniversaire de la mise en ligne de Tënk. Si la plateforme a pu voir le jour, notamment à Lussas, petit bourg de 1 000 habitant·e·s, c’est que le terreau était ici fertile ! Le village s’étend autour de deux routes principales qui forment un carrefour. Les terres environnantes sont fruitières : cerises, raisins, pêches, pommes, poires, abricots, etc. Les tracteurs passent dans un sens, puis dans l’autre. Et c’est là qu’à la fin des années 70, une bande d’ami·e·s ardéchois – fils et filles de paysans – se met à faire des projets culturels et artistiques dans un joyeux bricolage bénévole et militant. Passionné·e·s de cinéma, c’est même un festival « Cinéma et cheval » qui voit le jour pour deux éditions, et qui lie le travail de la terre au 7ème art. Cela amène des habitant·e·s, qui n’en avaient pas l’habitude, à venir voir des films. À l’époque, les gens vivent principalement de la production de fruits et de l’élevage. Parallèlement aux activités agricoles – toujours de mise aujourd’hui -, la troupe de trentenaires imagine créer ici, au milieu de champs d’oliviers, une économie nouvelle, au service du cinéma ! Le travail autour des films documentaires commence donc il y a 40 ans, avec la conviction que la création n’a pas à être confinée dans les grandes villes, qu’elle advient en tout lieu et qu’il faut une filière pour lui permettre d’être protégée et partagée avec des publics. La motivation qui façonne les projets à Lussas depuis toutes ces années est de défendre un cinéma documentaire engagé, non-formaté, libre dans sa forme et ses propos. L’objectif est de favoriser la création en région, de permettre aux films d’être vus et à leurs auteur·e·s de venir en parler, de se faire également médiateur dans la transmission des œuvres documentaires.
L’activité audiovisuelle y a grandi et s’est diversifiée avec l’aspiration d’être présente à toutes les étapes de fabrication et de diffusion d’un film. Chaque structure vient apporter sa contribution à une logique plus globale, pour composer aujourd’hui un “écosystème” en faveur de la création documentaire, souvent fragilisée par le manque de soutiens financiers. Le Village documentaire de Lussas, ce sont des idées dans tous les sens, qui deviennent petit à petit des structures administratives avec une réalité économique. Mais ce sont surtout des gens. Certain·e·s restent longtemps, certain·e·s quelques semaines seulement. Et c’est bien toutes ces énergies qui, depuis 40 ans, convergent pour faire advenir quelque chose de rare. Ce qui existe aujourd’hui à Lussas, on le doit à la coopération des multiples talents qui sont un jour passés par là.
Le Collectif est un vaste chantier ! Il faut donner de soi, changer de ton, savoir se dire, concéder… Cela vaut le coup. Tiens, en parlant de chantier… Ce chantier-là a commencé en 2016, avec une première pierre posée pendant le festival des États généraux du film documentaire. Comme chaque année, c’était au mois d’août. Il faisait chaud. Depuis, un bâtiment de 1 500 m2, financé par la Communauté de Commune Berg-et-Coiron, est sorti de terre. …Au début du mois de juillet, la migration vers les nouveaux locaux s’est engagée pour quelques structures (Docmonde, Lumière du monde, film-documentaire.fr, AndanaFilms, Docfilmdepot et Tënk). En septembre, nous serons rejoints par Ardèche images (École du doc, les États généraux du film documentaire, la Maison du Doc, les Toiles du doc). Au-delà du rapprochement physique qu’il induit, ce déménagement va permettre une collaboration plus étroite et de concrétiser ensemble des perspectives d’avenir. Pôle de coopération réunissant les différentes structures – auparavant parsemées dans le bourg -, ce lieu va également apporter un nouveau souffle aux activités lussassoises. Les locaux hébergent des espaces de post-production – studios de montage, mixage, étalonnage – qui seront équipés par Tënk au fil des mois à venir afin d’accueillir des équipes tout au long de l’année. De nouvelles entreprises et associations nous ont rejoint dans les bureaux, parmi d’autres encore à venir. Même si l’enseigne n’est pas encore installée, le bâtiment porte déjà un nom. Sur la façade, sera bientôt indiqué : L’Imaginaïre. Alors que pour nommer Tënk, nous avons fait appel au Wolof, langue majoritaire au Sénégal, c’est à l’Occitan que nous empruntons cette fois le mot. Il signifie “le doux rêveur, le fou du village”… Ce sont sous ces auspices que nous démarrons une nouvelle ère.
Crédits schémas et photos : © Tënk
Crédit dessin : © Tom Joseph – Florie Keller – Atelier Noir Cambouis